samedi 5 juillet 2014

Tératologie Footballistique

Maintenant que l’équipe de France est dans l’avion, les zélés commentateurs s’interrogeront sur la physionomie de cette Coupe du monde si celui qui porte sur son visage les stigmates de son enfance, comme les plaies du Christ ne cessent de nous rappeler ce rite exotique qu’est la crucifixion, avait été présent. Car oui, les compagnons d’infortune de Ribéry, ses apôtres en quelque sorte, dans le championnat allemand ou avec les Bleus, jouent reclus à l’arrière du terrain afin de retarder l’instant où ils devront croiser le regard du monstre qui leur rappelle, cruellement, qu’ils ne sont qu’humains après tout.


Il eut été trop évident, pour un entraîneur cynique, d’enfermer Ribéry dans une cage : il aurait ainsi effrayé les attaquants, leurs jambes auraient flagellé au moment du tir, souffle coupé, rose aux joues, vision fuyante, frisson sur les tibias, et le ballon passant à 20 mètres des poteaux…

« Monstres : on n’en voit plus », 
Flaubert dans son Dictionnaire des idées reçues.


C'est à l'âge de deux ans, suite à un accident de voiture, que Franck Ribéry a été marqué d'une large cicatrice au visage. Les surnoms l'ont ensuite suivi toute sa scolarité : « A l’école, les autres m’appelaient Frankenstein » a-t-il déclaré au journal allemand Sport Bild. On ne pourra pas reprocher au capitaine de l’équipe de France de n’être point cinéphile : Frankenstein est le nom du docteur, pas celui du monstre. Voilà ce qu’il aurait pu répondre à ses camarades de classe mais un coup de poing faisait aussi bien l’affaire. Autre insulte proférée, ma préférée : « Lascarface »… 

« J'ai souffert à cause de cette cicatrice 
mais elle m'a aussi rendu plus fort. 
Si tu n'étais pas fort dans la tête, 
tu étais un homme mort ».


Avec la précision qu’offre aujourd’hui la chirurgie esthétique, il semble presque inconcevable que l’attaquant bavarois n’ait pas souhaité gommer cette trace de son passé, difformité anachronique. Lui-même apporte une réponse à cette interrogation : « Personne ne touchera à ma cicatrice ; sinon, ce n'est plus moi ». 



Comme Gwynplaine, le héros laid de Victor Hugo, Frank Ribéry est un « homme qui rit » : calembouriste approximatif : « J’espère que la routourne va vite tourner », Kaiser de l’auto-dérision : « Moi personnellement, je me critique moi tout seul », il renouvelle une forme de poésie de l’absurde, du non-sens ; dans la lignée d’un Cantona (qui, au contraire de Ribéry, prenait des airs insupportables d’artiste ; ce qu’il pense d’ailleurs être devenu) ou d’un Van Damme. Ses propos sont compilés, montés en boucle, reproduits à l’infini, édités, recopiés… Et croyez-vous qu’il exigeât des droits d’auteur en compensation ? Non, alors, quel désintéressement !


« Alors que les joueurs et l'encadrement du Bayern attendaient dans le bus pour se rendre de leur hôtel au stade d'entraînement, Franck Ribéry a pris le volant du véhicule. L'ancien Marseillais a voulu faire le tour du complexe hôtelier mais a raté sa manoeuvre. Il a arraché deux panneaux d'affichage et renversé un plot en béton ».

Ribéry est un potache, il perpétue l’esprit de chambrée, bon enfant, insolence sans méchanceté à la française : seau d'eau sur la tête, sel dans le verre, chaussettes découpées, dentifrice dans les chaussures, coussin péteur dans les vestiaires… Il est comme ce vieil oncle farceur qu’on aime détester dans les repas de famille ; sa présence nous indispose mais son absence provoque un malaise encore plus grand. 

 


« Avec lui, je prends beaucoup de plaisir. Il adore déconner. A table, je suis assis à côté de lui et je suis tout le temps mort de rire. Il y a quelques années, j'avais été interviewé par une télé française. Franck me chambrait à travers la fenêtre des vestiaires pour essayer de me déconcentrer » - Daniel Van Buyten.

Question rigolade, avec Benzema, on peut dire que l’équipe de France est vernie. Sa meilleure vanne datant d’il y a 4 ans...

Dj Zukry

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