mercredi 9 juillet 2014

Pays-Bas vs Argentine



Prise dans sa pure dimension de spectacle à audience planétaire, notre demi-finale Argentine-Pays-Bas a quand même une foutue pression. L’enjeu : ne pas sembler foncièrement risible à côté des Jeux du cirque de la veille, cette exhibition quasi-pornographique, ce combo « german gang-bang bukkake on young brazillians » qui fit rouler les yeux comme des ballons et nous balança entre malaise trouble et pulsions scopiques, au point d’équilibre ultime entre la gêne et le plaisir. Ne pas être réduite à vivre continuellement dans l’ombre dévorante du match précédent, inscrite dès la mi-temps sur les tablettes des livres d’histoires, des rapports statistiques, mais aussi des journaux intimes, car on s’en souviendrait encore dans 20 ans comme d’une sorte de 11 Septembre du foot, qui dépassa en direct le seuil critique d’incrédulité du spectateur pour taper une incruste définitive dans les emplois du temps et les mémoires individuelles. Du genre « han ouais, Brésil-Allemagne, je me souviens encore que j’avais vu le match avec Michel et que j’avais mangé une pizza aux anchois».

Arjen Robben a bénéficié d'un entraînement spécifique
pour obtenir plus de pénaltys.
Donc, pendant qu’un Panzer marchait sur l’eau et qu’un Christ rédempteur buvait la tasse à sept reprises, finissant par agoniser la bave aux lèvres dans une dernière prière, notre demi-finale Argentine-Pays-Bas, elle, se rongeait les ongles, un peu plus cernée par l’angoisse à chaque percée teutonne de la Ligne Maginhõ. Que faudrait-il donc faire le lendemain pour tirer le peu de couverture restante à soi, braquer le dernier projecteur dispo sur sa gueule et tenter d’annuler l’impact d’une exécution en Mondovision ? Faire oublier l’image déchirante de ces niños en pleurs dès la 25ème minute, découvrant enfin l’imposture auriverde ? Eclipser le record de buts de Klose, volé sans vergogne à Ronaldo dans son propre pays, sous ses propres yeux bouffis ? Et comment finalement exister en tant que telle, « moi, demi-finale Argentine-Pays-Bas, 62ème match de la Coupe du monde 2014 » ?

Même marquer encore plus de buts, avec un petit score de pongistes à la fin,
En cas de tirs aux buts, le sélectionneur
argentin tenterait un coup de poker :
la rentrée de Croketta sur le terrain.
genre 11-8, il n’était pas certain que ça fonctionne si on voulait faire péter à son tour le tout frais record de tweets lors d’un événement sportif. Vous savez, ce grand concours mondial de la petite blague, qui réveille sauvagement le chansonnier raté en chacun de nous, prêt dès lors à vendre sa mère pour un bon mot, à filer la métaphore de l’impérialisme allemand et à faire l’amour toute la nuit au point Godwin. 
Alors, bon dieu, que faire pour exister ce soir ? Que Nigel De Jong empale Messi sur un poteau de corner et ne récolte qu’un avertissement ? Que Van Persie joue avec un jet pack dans le dos pour marquer d’une papinade à 6 mètres de haut ? Que Robben obtienne un pénalty après chacun de ses 17 gadins en toc dans la surface ? Ou que Louis Van Gall fasse rentrer le kiné de l’équipe batave pour la séance des tirs au buts ? Non, aucun de ces scénarii ne fut retenu par la FIFA, il est prévu ce soir tout autre chose, qu’on ne saurait révéler sous peine de vous gâcher la partie. Mais il est fort à parier, que dans 20 ans, vous vous souviendrez que ce soir vous aviez mangé des Knacki avec Stéphane et José.
YLB

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